Sandro Assogna

Avantages fiscaux pour les impatriés en France : comprendre le régime français

Le régime fiscal des impatriés est un outil puissant que j'utilise régulièrement pour accompagner mes clients dans leur mobilité internationale. Il permet, sous conditions, de bénéficier d’exonérations d’impôt sur le revenu pendant une période pouvant aller jusqu’à huit ans. Je vous propose ici une présentation complète et actualisée du régime, avec un exemple chiffré et mes conseils pratiques pour optimiser son application.

Categorie
Mobilité internationale
Date
8.10.24

Comprendre le régime fiscal des impatriés

Le régime français des impatriés vise à encourager l’installation en France de talents recrutés à l’étranger. Il permet une exonération partielle d’impôt sur certaines composantes de la rémunération, dès lors que plusieurs conditions sont remplies. Ce dispositif s’applique jusqu’au 31 décembre de la huitième année suivant celle de la prise de fonctions.

Deux types d’exonérations peuvent s’appliquer simultanément :

  • La prime d’impatriation
  • La rémunération afférente à l’activité exercée à l’étranger

1. L’exonération de la prime d’impatriation

Qu’entend-on par « prime d’impatriation » ?

Il s’agit des suppléments de rémunération, en espèces ou en nature, spécifiquement liés à l’installation en France. Cette prime doit être prévue dans le contrat de travail, le mandat social ou dans un avenant.

Lorsque le montant exact ne peut pas être défini à l’avance, il suffit qu’il soit déterminable à partir de critères objectifs (ex. : pourcentage de la rémunération de base, logement de fonction) [1].

Évaluation forfaitaire possible

Le salarié ou dirigeant impatrié peut, s’il le souhaite, opter pour une évaluation forfaitaire : 30 % de la rémunération nette totale hors dispositifs d’épargne salariale. Cette option inclut également les indemnités de rupture [2].

Une limite à respecter : la rémunération de référence

La rémunération nette imposable en France ne peut être inférieure à celle d’un salarié exerçant des fonctions équivalentes dans l’entreprise ou dans une entreprise comparable. En cas d’écart, la différence est réintégrée dans le revenu imposable.

2. L’exonération de la rémunération liée à l’activité exercée à l’étranger

Cette exonération concerne les jours travaillés hors de France, dès lors que ces déplacements s’inscrivent dans l’intérêt direct et exclusif de l’entreprise française [3].

3. Deux options de plafonnement à arbitrer

Le régime prévoit deux plafonnements alternatifs. Lors de la déclaration annuelle, l’impatrié doit choisir entre :

Option 1 : plafonnement global

  • L’ensemble des exonérations (prime + activité étrangère) est plafonné à 50 % de la rémunération totale.

Option 2 : plafonnement ciblé

  • La prime d’impatriation est exonérée en totalité.
  • La rémunération liée à l’activité étrangère est exonérée dans la limite de 20 % de la rémunération imposable.

4. Exemple chiffré commenté

Voici une situation que je rencontre régulièrement en cabinet :

  • Rémunération de base nette : 90 000 €
  • Prime d’impatriation nette : 130 000 €
  • Rémunération de référence : 100 000 €
  • Jours de travail à l’étranger : 80 jours sur 240 ouvrés

Calculs :

  • Rémunération imposable : 100 000 € (alignée sur la référence)
  • Prime d’impatriation exonérée : 120 000 € (220 000 – 100 000)
  • Rémunération étrangère exonérable : 33 333 € (100 000 / 240 * 80)

Comparaison des deux options de plafonnement

Option 1 : plafonnement global à 50 %

  • Rémunération totale : 220 000 €
  • Rémunération exonérable (avant plafonnement) : 120 000 € (prime) + 33 333 € (activité étrangère) = 153 333 €
  • Plafond global : 50 % de 220 000 € = 110 000 €
  • Exonération finale : 110 000 €

Option 2 : plafonnement différencié

  • Prime d’impatriation exonérée : 120 000 € (dans la limite de la rémunération de référence)
  • Rémunération étrangère exonérée : plafonnée à 20 % de la rémunération imposable, soit 20 000 €
  • Exonération finale : 140 000 €

Conclusion : L’option 2 permet une exonération plus avantageuse de 30 000 € supplémentaire dans cet exemple.

5. Qui peut bénéficier du régime ?

Ce régime s’applique :

  • Aux salariés et dirigeants appelés à occuper un emploi en France (CDD ou CDI), recrutés à l’étranger ou transférés depuis une entreprise hors de France [4] ;
  • Aux dirigeants listés à l’article 80 ter du CGI [5], notamment :
    • SA / SAS : présidents, directeurs généraux, membres du directoire, etc.
    • SARL : gérants minoritaires ou égalitaires
    • Autres sociétés à l’IS : dirigeants fiscalement assimilés à des salariés

6. Quelles sont les conditions à remplir ?

Pour bénéficier du régime, plusieurs conditions doivent être respectées chaque année :

a) Être recruté depuis l’étranger

Soit par une entreprise étrangère, soit directement par une entreprise française.

b) Ne pas avoir été résident fiscal en France

Pendant les cinq années civiles précédant l’arrivée (article 4 B du CGI) [6].

c) Avoir son foyer fiscal en France

Autrement dit, y résider habituellement et y avoir le centre de ses intérêts familiaux [7].

d) Exercer son activité principale en France

C’est-à-dire l’activité la plus prenante ou la plus rémunératrice à l’échelle mondiale [8].

À noter : si les conditions ne sont pas respectées une année, le régime ne s’applique pas cette année-là, mais cela n’empêche pas de le faire valoir les années suivantes, dans la limite de huit ans.

Conclusion

Le régime fiscal des impatriés offre un levier puissant d’optimisation pour les talents internationaux qui s’installent en France. En tant qu’avocat fiscaliste, je recommande une analyse fine, au cas par cas, pour maximiser les exonérations tout en sécurisant la situation au regard des exigences de l’administration fiscale.

[1] BOI-RSA-GEO-40-10-20 n. 70 (date de début de publication du BOI : 21/06/2017)

[2] Conseil d'État, 9ème - 10ème chambres réunies,04/10/2023, 466714

[3] BOI-RSA-GEO-40-10-20 n. 220(date de début de publication du BOI : 21/06/2017)

[4] BOI-RSA-GEO-40-10-10 n. 10 (date de début de publication du BOI : 21/06/2017)

[5] BOI-RSA-GEO-40-10-10 n. 70 et n. 80 (date de début de publication du BOI : 21/06/2017)

[6] BOI-RSA-GEO-40-10-10 n. 150 (date de début de publication du BOI : 21/06/2017)

[7] Conseil d'Etat, Section, du 3 novembre 1995, 126513,publié au recueil Lebon

[8] BOI-IR-CHAMP-10 n. 220 (date de début de publication du BOI : 28/07/2016)

Sandro Assogna
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